Bien manger avec de faibles reveus

Article paru dans l’Est Républicain du 16/12/04

 

Mais peut-on, avec un petit budget avoir une alimentation équilibrée ?

Dans notre pays, pratiquement tout le monde mange à sa faim, et même davantage… La surabondance alimentaire n’est pourtant pas un gage de bonne santé, en particulier dans les foyers défavorisés.

Lors de la quatrième journée “Alimentation et précarité”, organisée en octobre au Palais du Luxembourg, les experts, réunis à l’invitation du CERIN (Centre de recherche et d’information nutritionnelles) n’ont pas manqué d’en faire le constat.

Les enquêtes en témoignent : certains comportements alimentaires considérés comme dommageables sont aggravés chez les plus défavorisés. Repas sautés ou inexistants, grignotages réguliers remplaçant les repas, forte consommation d’aliments gras et sucrés, faciles à consommer sans préparation : chips, viennoiseries, barres chocolatées, boissons sucrées…Et, à l’inverse, consommation insuffisante de fruits et légumes, de produits laitiers, de poissons…

Les conséquences de ces « mauvaises habitudes » alimentaires inquiètent les nutritionnistes. C’est dans les populations démunies que l’on observe le plus de déficits en vitamines et en minéraux (comme le calcium), susceptibles de favoriser l’apparition de nombreuses pathologies : maladies cardio-vasculaires, cancers, diabète, ostéoporose…

C’est aussi dans ces mêmes populations que l’obésité progresse le plus : elle touche 15% des femmes en situation de précarité contre 8% dans la population générale. Enfin, dans ces mêmes milieux défavorisés, le risque de désocialisation apparaît élevé, en raison de l’abandon des repas et des repères structurants pour l’individu.

Pour exprimer le recul des comportements alimentaires “traditionnels”, plus favorables à la santé, les experts avancent plusieurs hypothèses. La perte de la transmission des savoirs culinaires, en particulier dans les populations immigrées. L’inquiétude ou le découragement face à des si-tuations sociales difficiles. Le manque de temps, de motivation ou d’implication pour la préparation des repas. L’influence de certaines publicités, surtout télévisées. La hausse des prix des produits frais comme les fruits et les légumes.

Pourtant, avec un peu de formation et d’attention, il est possible de bien manger avec un petit budget. Encore faut-il rendre leur place à des repas réguliers, pris à la maison, qui semblent le meilleur moyen de “manger de tout” (fruits, légumes, produits laitiers, féculents…). Revaloriser l’acte de cuisiner au quotidien. Retrouver le goût de la « cuisine du marché », en diminuant la consommation des produits tout prêts, souvent trop gras et trop sucrés. Et en sélectionnant, à chaque saison, les produits les moins coûteux : ce qui est possible, même pour les fruits, les légumes ou les poissons ! Dans ces conditions, la préparation des repas peut être l’occasion de manger plus économique et plus équilibré.

Les responsables de la santé publique en sont, semble- t-il, de plus en plus conscients.

Présente à la quatrième journée organisée sur ces questions par le CERIN, Nelly Olin, ministre déléguée à la lutte contre la précarité et l’exclusion, a réaffirmé la nécessité d’actions de terrain auprès des plus démunis. Avec l’espoir de redonner le goût de se mettre à table.

NDLR : L’excès de plats cuisinés et de laitages préjudiciables à la santé, une fois réduit, dégage une certaine somme d’argent pour acheter des produits complets et de qualité. Il ne faut pas oublier que l’association céréale + légumineuse apporte tous les acides aminés essentiels, au même titre que la viande : 1 livre de lentilles et 1 livre de céréales seront toujours moins chères qu’une livre de viande en rassasiant mieux toute la famille.
 


Au menu ce soir

Pour donner suite à cet article, nous vous proposons les recettes d’un menu économique, facile à réaliser et sans viande, pour découvrir comment utiliser d’autres sources protéiques. Si la réduction de la viande est bénéfique pour la santé, elle permet aussi d’équilibrer son budget en laissant une plus large place aux fruits et légumes de qualité.

  • Salade mélangée au chou rouge, noix et graines germées
  • Soupe de pois cassés à l’algue Kombu
  • Tarte aux pommes à la violette

 
Nous allons détailler ce menu, sans entrer dans le détail de la composition de chaque ingrédient, mais pour comprendre comment élaborer un menu équilibré.

Le plat principal est la soupe de pois cassés. Les pois cassés, qui sont des légumineuses, nous apportent des protéines végétales tout comme l’algue Kombu, qui de plus, est d’une grande richesse en sels minéraux. Les carottes et les poireaux apportent la ration de légumes indispensable à chaque repas.

Cette soupe est verte et nous choisirons donc pour commencer le repas une salade à laquelle nous ajouterons de la couleur : si possible on mélangera 2 sortes de salades, le chou rouge émincé apportera de la couleur ainsi que son exceptionnelle richesse en minéraux et vitamines (il est bon de consommer régulièrement du chou cru), les graines germées et l’oignon rose viendront diversifier les saveurs, en apportant de la vitalité, les noix, oléagineux riche en protéines, complèteront l’apport en protéines de la soupe avec en plus un apport en oméga 3.

La tarte aux pommes permettra l’apport d’une céréale complète pas trop riche en gluten, l’épeautre, et les pommes complèteront la ration de fruits et légumes. Les violettes, c’est pour le plaisir : couleur, parfum printanier, délicatesse de la fleur…

Le kouzou permet d’avoir une jolie tarte brillante sans apport de sucre, en plus il est bénéfique aux intestins.

Par curiosité, comptons les apports en fruits et légumes : salade, chou rouge, oignon, noix, carottes, poireaux et pommes, cela fait 7 et nous n’avons pas compté les graines germées! “5 à 10 fruits et légumes par jour” c’est facile, en voilà déjà 7 en un seul repas. En plus nous avons varié les familles : organosulfurés (oignon, poireau), oléagineux (noix), légumes verts (salades), légumes orange (carottes), légume violet ou rouge (chou rouge), fruit jaune (pomme).

En effet pour bien manger il n’est pas nécessaire de connaître la composition de chaque fruit et légume, rappelons-nous simplement que : chaque légume, fruit ou graine contient des micronutriments différents qui agissent en synergie et qui associés seront beaucoup plus efficaces. Si nous varions les couleurs, nous agrandissons la palette des micronutriments apportés à chaque repas.
 

Salade mélangée au chou rouge, noix et graines germées

Ingrédients

  • Salade verte de saison, si possible 2 variétés
  • Un morceau de chou rouge
  • Un oignon rose
  • Quelques cerneaux de noix
  • Graines germées : radis et alfalfa

 
Préparation

  • Trier et laver la salade.
  • Laver et émincer le chou rouge et l’oignon rose, le mettre avec la salade dans un saladier.
  • Ajouter les noix et les graines germées.
  • Pour la sauce : vinaigre de cidre, moutarde au citron, sel aux herbes et huile de noix ou tournesol par exemple.

 

Soupe de pois cassés

Ingrédients pour 4 personnes :

  • 300 g de pois cassés
  • 4 petite carottes
  • 2 poireaux
  • un morceau d’algue Kombu
  • 1 feuille de laurier piquée d’un clou de girofle
  • Sel, poivre
  • Huile d’olive

 
Préparation

  • Faire tremper les pois cassés dans de l’eau froide environ 3 heures.
  • Faire tremper environ 20 mn l’algue Kombu dans un peu d’eau froide, après l’avoir rincée.
  • Égoutter les pois cassés, les rincer, les couvrir d’eau froide et les porter à ébullition.
  • Retirer la mousse blanche qui se forme au moment de l’ébullition, ajouter le laurier piqué d’un clou de girofle et l’algue avec son eau de trempage. Laisser mijoter 30 à 45 mn.
  • Pendant ce temps, laver et couper en morceaux les carottes et les poireaux.
  • Les ajouter aux poix cassés.
  • Laisser mijoter encore environ 15 mn.

 
Quand tout est cuit, saler, poivrer, retirer le laurier et le clou de girofle et mixer avec l’algue. Corriger l’assaisonnement et l’épaisseur de la soupe en rajoutant un peu d’eau si c’est trop épais. Cette soupe se mange assez épaisse. Ajouter un filet d’huile d’olive dans l’assiette.

On peut, pour ceux qui ont plus d’appétit (adolescents, travailleurs) l’accompagner de tranches de pain 1/2 complet légèrement grillées et frottées à l’ail.

NB : Vous remarquerez que nous introduisons les légumes au cours de la cuisson. En effet, les pois cassés nécessitent environ une heure de cuisson (même un peu plus si vous ne mettez pas d’algue), tandis que les légumes cuisent en 15 à 20 mn.

Procéder ainsi permet d’une part de gagner du temps et de préserver un maximum de saveur et de propriétés aux légumes. Rappelons nous que “Plus on économise la cuisson, plus on économise la santé”.

Variante :
Au printemps, on peut remplacer les poireaux en totalité ou en partie par des orties cueillies dans des lieux à l’abri des pollutions, c’est absolument délicieux.
À l’automne, on peut remplacer les poireaux par des courgettes, qui se marient également très bien avec les pois cassés.
 

Tarte aux pommes, vanillée à la violette

Le printemps arrive, nous avons donc choisi cette recette de tarte aux pommes à la violette qui permet de profiter du parfum des violettes qui embaument les premières journées ensoleillées du printemps. Bien sûr vous n’utiliserez que des violettes sauvages cueillies dans des lieux à l’abri des pollutions de toutes sortes. Si vous n’avez pas de violettes, vous pouvez simplement saupoudrer la tarte de cannelle et/ou de vanille avant de mettre le kouzou*, ou selon les saisons utiliser d’autres fleurs (comestibles bien sûr !)

Nous vous proposons une pâte à tarte à l’huile d’olive, qui permet d’éviter le beurre cuit, surtout pour les malades.

La pâte brisée au beurre, certes plus délicate, sera réservée aux jours de fêtes, je ne vous en donne pas la recette qui se trouve dans tous les livres de cuisine.

Ingrédients pour 6 à 8 personnes :

  • Pâte : 250 g de farine d’épeautre complet
  • 1 pincée de sel
  • 60 ml d’huile d’olive
  • 120 ml d’eau ou 1’oeuf et 60 ml d’eau
  • Garniture : 4 ou 5 pommes douces
  • 2 c à c de kouzou*
  • 1 verre de jus de pomme
  • Vanille en poudre
  • Fleurs de violette

 
Préparation

  • Préparer la pâte en mélangeant la farine, le sel et l’huile au robot ou à la main, pour obtenir comme du sable.
  • Ajouter l’eau (ou l’oeuf plus un peu d’eau si nécessaire) et pétrir pour obtenir une boule de pâte.
  • Cette pâte doit être travaillée le moins longtemps possible.
  • Étendre la pâte dans un plat à tarte légèrement fariné.
  • Éplucher les pommes, les couper en lamelles et les disposer joliment sur la tarte. Saupoudrer de vanille
  • Mettre à cuire 30 à 40 mn dans le four préchauffé thermostat 5, 160° environ, température bien supportée par l’huile d’olive (température critique : 210°)
  • Dans une petite casserole, mettre le kouzou à fondre dans le jus de pomme. Quand celui-ci est dissous, mettre à chauffer en remuant avec une cuillère en bois, laisser frémir quelques secondes, le mélange doit épaissir et devenir translucide.
  • Étendre la préparation aussitôt sur la tarte sortie du four avec un pinceau à pâtisserie. (Attention si le mélange refroidit avant d’être mis sur la tarte, il se fige.) – Décorer aussitôt en disposant les fleurs de violette qui vont se coller sur le kouzou.
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    Le kouzou, ou fécule d’igname est une fécule alcaline, très bénéfique pour les intestins, efficace contre les troubles du système digestif, diarrhées, refroidissement et grippe. Peut se donner aux bébés. On le trouve dans les magasins diététiques.

    N’oublions pas que les recettes doivent toujours s’adapter à la saison.